Music is the weapon of the future !
Bonjour
les Êtres humains !
Il
y a une semaine, j’ai dû jouer les apprentis informaticiens avec
mon ordinateur. Et, après avoir réinstallé le système
d’exploitation (je vous épargne les détails techniques), je me
suis rendu compte qu’il me manquait le pilote de la carte son. En
gros, je n’avais pas de son du tout, et pas de chance, je n’avais
pas de connexion internet. J’ai dû passer quelques jours avant que
les choses ne revinrent à la normale. Toutefois, ces quelques jours
d’attente m’ont fait remarquer combien de fois je suis
littéralement accro à la musique. Le fait de ne pas pouvoir écouter
un titre que j’aime bien, le matin au réveil, ou après le sport,
me faisait presque déprimer… Il faut dire que je suis un gros
consommateur de musiques de tous genres et de tous les styles, pourvu
que ça sonne juste. Et c’est comme ça depuis que je suis enfant.
Tout
le monde à la maison n’a de cesse de me rappeler que lorsque
j’avais moins de cinq ans, mon oncle, chez qui je vivais, achetait
des disques vinyles juste pour moi. Je me rappelle encore de la
pochette de l’album « Thriller », que sa veuve conserve
toujours précieusement. Il y avait griffonné mon nom pour bien
signifier que c’était
pour moi qu’il l’avait acheté. Mais s’il y a une chose qui m’a
beaucoup marqué, c’est que le premier compact-disc qui me fut
offert par mon père était un double-single de Bob Marley. Drôle de
choix pour quelqu’un qui n’écoute que de la Rumba congolaise !
Ce cadeau eut tout de même l’effet que je crois qu’il
recherchait. Je me suis mis à m’ouvrir à tous les styles de
musiques possibles, au lieu de n’écouter exclusivement que du
Hip-hop et du R’n’B.
Aujourd'hui,
ma discothèque est totalement hétéroclite, allant d’Otis Redding
à Drake, en passant par Miriam Makeba, Fela Kuti, Akendegué, Malvoi
ou encore Nneka, Ayo,
Chris Brown,
parmi tant d’autres. Parfois, en écoutant certains, et en me
renseignant un peu sur leur vie, je me dis que les chanteurs des
décennies passés étaient de vrais artistes, dans le sens que je
donne à ce mot. Car, pour moi, un artiste c’est quelqu’un qui
utilise ses sens et son corps pour EXPRIMER
autrement la vie, et qui donc est sensé COMMUNIQUER
à ses auditeurs, et à la société en général, un MESSAGE
constructif. C’est, d’après moi, pour cela qu’on paie pour les
écouter et les voir se produire. Ce n’est pas seulement pour nous
distraire. Certes, il y a eu ceux qui ont su répondre à cette
définition. Je ne peux pas tous les citer ici, mais je vais vous
parler de quelques uns de ceux que j’admire le plus.
Je
commencerai par la personne qui m’a toujours le plus impressionné,
tant de par son talent, de part sa notoriété que par son engagement
dans une cause juste. C’est
Miriam
Makéba.
Cette femme d’une beauté à couper le souffle, qui a connu le
succès dès les années 50 avec son titre le plus connu, « Pata
Pata », a vécu une enfance difficile avant de devenir celle
qu’on appelait affectueusement « Mama Afrika » et qui
sera, bien avant Nelson Mandela et les autres Peter Biko, le symbole
de la
lutte anti-apartheid
dans, et au de-là de son Afrique du sud natale. Elle envoûtait,
dans diverses langues, allant de l’anglais à l’espagnol, en
passant par le français, sans compter toutes les langues africaines
qu’elle pratiquait, tout son auditoire. Elle a longtemps vécu hors
de son pays natal, et a obtenu les citoyennetés guinéenne,
algérienne et française. Il faut dire que le régime sud-africain
d’alors l’avait condamné à un exil qui durera 31 ans, pour être
apparue dans une production anti-apartheid titrée « Come Back
Africa ». Elle ne cessa pourtant pas de s’exprimer contre
l’oppression noire sur sa terre natale,
tout le long de son périple à travers le globe. J’ai le bonheur
d’avoir en ma possession une véritable discographie de cette
grande dame, et parfois, je tombe sur une piste sur laquelle elle
parle plus qu’elle ne chante, dénonçant la triste situation dans
laquelle se trouvait l’Afrique du Sud. Et je me dis toujours à cet
instant : « ça, c’était vraiment une femme qui
aimait son pays ! »
Il
y en a un autre que j’admire presque
autant
que la grande Miriam, sur le continent. Il s’agit de M. Fela
Anikulapo Kuti.
Il y a
tant à dire sur cet homme ! Chanteur, saxophoniste, chef
d'orchestre et homme politique nigérian, Fela a connu plusieurs
dictatures dans son pays, dès la sortie de la crise du Biafra. Tout
au long de sa carrière, son œuvre musicale aura autant d'influence
que son engagement politique, puisqu'il est le père de l'Afrobeat,
un mélange entre les sonorités américaines que sont le Jazz et le
Funk, et des rythmes populaires africains de son époque, le Highlife
et le Ju-ju. C'est grâce à ce nouveau courant musical qu'il
dénoncera la corruption, la dictature et l'emprise des
multinationales dans son pays, à peine devenu grand producteur de
pétrole. Son combat lui a valu plusieurs séjours en prison, sous
divers régimes dictatoriaux. Mais Fela ne fit pas que de la
dénonciation, puisqu'en 1979, celui qui se fait appeler « Black
President » fonde le Mouvement
of the People,
parti politique à la tête duquel il promet de se présenter au
élections présidentielles de 1983. Il n'ira pas jusqu'au bout de
son engagement, puisqu'après une énième arrestation, son parti et
sa branche culturelle, les Young
African Pionners,
seront interdits dès 1981. de tous les faits d'armes de ce fils
d'une grande activiste nigériane, celui qui retient le plus mon
attention est son boycott du Festival mondial des Arts Nègres, qui
se tien en janvier 1977, à Lagos. Fela aura passé une grande partie
de sa vie et de sa carrière à lutter contre les maux qui minent son
pays, et laissera une trace indélébile
dans l'histoire du Nigeria et de l'Afrique noire en général. Pour
moi, lui et Miriam Makeba sont les deux plus grandes figures du
militantisme dans la musique africaine. Ils ne sont pourtant pas les
seuls, et feront de nombreux émules, au fil du temps.
Ces
deux grands artistes ont laissé un lourd héritage que plusieurs
artistes ont tenté, tant bien que mal, d'incarner après eux.
Étrangement, ceux qui reflètent, pour moi, dans les générations
suivantes, ce même engagement, sont des artistes d'un style de
musique qui n'est devenu vraiment populaire qu'à partir des années
70. Il s'agit du reggae. Ce courant naturellement activiste a donné
naissance à une multitude de porte-voix en Afrique, dont les
derniers vrais représentants encore vivants sont les Ivoiriens Alpha
Blondy
et Tiken
Jah Facoly.
Ce que je trouve dommage, c'est que ces derniers ne soient plus juste
que des dénonciateurs. En effet, leur combat ne s'arrête plus que
sur le plan artistique, dans les paroles de leurs opus, dans quelques
mouvements culturels, ou encore dans des titres collectifs qui
portent des messages aussi nobles que la lutte contre le virus Ebola,
par exemple. Il faut tout de même reconnaître qu'ils ne sont plus
très jeunes...
En
écoutant tous ces nouveaux styles de musiques qui ont émergés un
peu partout sur le continent ces vingt dernières années, je peux
citer en exemple le Ndombolo du Congo, le Coupé Décalé de Côte
d'Ivoire, tous ces jeunes artistes nigérians et ghanéens qui ne
cessent de faire l'apologie de la célébration et de l'amour
fusionnel, j'en suis arrivé à me demander à quoi sert vraiment la
musique actuellement, sur le continent. Le pire est que si la majeure
partie des nouveaux courants musicaux du continent ne semblent pas
trop s'intéresser aux réalités même que vivent les Africains,
beaucoup participent plutôt à abrutir et dépraver nos jeunes
frères et sœurs. Je ne citerai aucun de ces styles musicaux ici,
pour ne pas donner l'impression de montrer certains du doigts, tant
il y en a, mais j'aimerais tout de même faire remarquer une drôle
de tendance actuelle. J'ai un ami qui fait de la musique. Il est
rappeur. Il y a quelques années, lorsque je l'ai rencontré, il
venait de sortir un album qui, en résumé, appelait au changement
des mœurs et avait un regard critique sur les dirigeants africains.
Chose que je trouvait assez bien. Or, il y a quelques mois, lorsque
nous nous sommes revus, il avait changé de message. Aujourd'hui, ses
titres ressemblent plus à ceux du rappeur Franco-Sénégalais Booba,
qu'autre chose : des histoires d'argent,de pouvoir et de sexe...
je lui ai subtilement demandé pourquoi ce revirement : « il
faut bien suivre la tendance, car c'est ce qui se vend le mieux en ce
moment ! », m'a-t-il répondu. Aïe ! Si même le
rap, qui, à l'origine, est un mouvement culturel né d'une grosse
crise politico-sociale dans le Bronx de la fin des années 70, ne
sert plus à « réveiller les consciences », il ne me
reste plus qu'à jeter ma discothèque...
Toutefois,
depuis 2012, il y a une poignée d'artistes qui ont réussi à me
redonner espoir dans la valeur militante de la musique. Ce ne sont,
bien évidement, pas de grosses célébrités ou des grands noms
connus de la musique africaine, mais plutôt des jeunes de ma
génération, peu connus sur la scène internationale. Pourtant, en
se servant de leur petite notoriété et leurs voix, ils ont réussi
à chasser deux chefs d’États ! Je veux bien sûr parler du
mouvement « Y
en a marre »,
du Sénégal, et du « Balai
citoyen »,
au Burkina Faso. Le premier est composé à sa naissance des rappeurs
du groupe Keur
Gui
et des journalistes Cheick
Fadel Barro et
Alioune
Sané.
Ce mouvement de contestation pacifique, né à la suite des coupures
intempestives d'électricité dans la capitale sénégalaise, a
largement milité pour convaincre les jeunes de s'inscrire sur les
listes électorales en vue des élections présidentielles de 2012,
qui ont sonnées la fin de la présidence de Me Wade et ont permis au
pays de passer à une transition démocratique, faisant du Sénégal
un modèle en la matière, en Afrique noire francophone.
Le
Balai citoyen, quant à lui, a été fondé dans le sillage de « Y
en a marre », au pays des Hommes intègres, par deux jeunes
artistes. Le rappeur Smokey
et Sams
K le Jah,
qui fait du reggae. Ce mouvement, qui naît suite au désir du
pouvoir en place de mettre en place un Sénat, grandit peu à peu
jusqu'à jouer un rôle primordial dans le soulèvement à l'origine
de la fuite du président Blaise Compaoré.
Ces
deux mouvements, à eux seuls, suffisent à prouver qu'un vent
nouveau souffle sur le continent. Le même que celui qui avait
souffler à l'aube des indépendances africaines, et qui avait
produit des hommes et des femmes comme Miriam Makeba, Fela Kuti,
Tiken Jah Fakoly, Alpha Blondy ? Ce vent saura-t-il emporter
vers le haut d'autres personnalités issus d'autres secteurs de la
société que la musique, comme il éleva, à l'époque, des hommes
de la trempe de kwame Nkrumah, Amilcar Cabral, Patrice Lumumba,
Thomas Sankara, Nelson Mandela ? Seule l'histoire nous le
dira... En attendant, je vous laisse méditer sur les paroles de ce
titre de Bob
Marley,
un autre artiste noir dont le message, bien que peu écouté, a
toujours eu une portée militante et éducative. Elles sont inspirées
d'un discours de l'empereur Hailé
Sélassié 1er à
l'Assemblée Générale des Nations Unies. Espérons, comme l'avait
dit Fela Kuti, de son temps, que cette fois si, on n'aura pas tord de
penser que la
musique est l'arme du futur, pour
lutter contre la pauvreté et l'injustice. Bonne fête
de la musique à
tous !
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