Musique et nuisances sonores, tapages nocturnes et autres désagréments





Bonjour les Êtres humains !



Ceux qui ont déjà lu quelques-uns de mes anciens billets l’auront surement remarqué : j’aime, que dis-je, j’adore la musique. J’en écoute dès que j’ai un peu de temps libre, quand je m’ennuie, quand j’ai envie de me concentrer pour faire un travail, ou juste pour me divertir l’esprit. Et mes goûts sont des plus éclectiques : je peux passer de l’Afrobeat de Fela, au Jazz de Nina Simone, en passant par le R’n’B de Beyoncé et le rap de Kendrick Lamar en une seule journée ! Souvent, je le fais dans ma chambre, et quelques fois, quand je suis dans un endroit public, j’enfile mes écouteurs et en quelques notes, je suis ‘’ailleurs’’. Bien évidemment, je sais que nous sommes des milliers, voire des milliards qui faisons de même sur le globe. Et les goûts sont aussi divers que ce dernier porte d’âmes. Cependant, il y a parfois des tendances, des habitudes qui se répandent très vite en Afrique, que j’ai beaucoup de mal à m’expliquer. La dernière en date, c’est cette volonté, ce désir commun à la plupart des jeunes, et même des moins jeunes, d’imposer leurs goûts musicaux à leur entourage.



J’avais déjà fait ce constat depuis un certain temps dans les rues de Dakar, capitale du Sénégal : les jeunes, plus souvent les adolescents, se baladent dans les rues munis de leurs Smartphones, qui hurlent, au plus fort de la capacité de décibels qu’ils peuvent débiter, soient des sonorités du Mbalax local, soient les dernières sorties en matière de Rap français ou américain, ou de hip-hop nigérian. Les premières fois que j’ai eu à rencontrer ce genre de personnes, je me suis dit : « ils ne doivent pas savoir qu’on a inventé les écouteurs depuis des décennies ». Étrangement, il semble que même les fabricants de ces accessoires, somme toute utiles pour l’écoute en toute discrétion, se sont mis à suivre la tendance. C’est ainsi que vous verrez maintenant certains mélomanes se promener avec des petites boites, souvent en forme de cubes ou de cylindres, qui tiendraient facilement dans une main, et qui rivalisent aisément avec nos vieilles chaines Hi-fi des années 90, en matière de qualité de son, mais surtout, de volume. Pour moi, ce genre d’appareils a surement été produit à destination de personnes qui désirent, sans s’encombrer d’un arsenal d’ampli et de branchements, faire la fête dans un contexte convivial, mais assez discret : une petite animation dans un parc, un concours de danse improvisé dans une cours d’école, ou entre amis, au bureau, pendant la pause (si vos supérieurs et l’environnement vous le permettent !). Je conçois mal que Sony, Beats by Dre ou les autres éditeurs de ce genre d’accessoires aient sérieusement indiqué, dans le mode d’emploi : « à utiliser en marchant dans la rue, pour obliger votre entourage à écouter VOTRE musique » !

Je me disais, il y a quelques mois, à Dakar, que les jeunes de cette ville devaient avoir des influences culturelles particulières, pour s’être accaparés ce genre d’habitudes. J’ai largement eu tort. Car, depuis que je suis arrivé à Libreville, il ne se passe pas une journée durant laquelle je ne croise un jeune armé de cet accessoire, déambulant tranquillement dans les rues de mon quartier, ou même du reste de la capitale Gabonaise. Il faut souligner qu’à Libreville, ces petits haut-parleurs portatifs ne sont pas très répandus. Le plus souvent, ce sont les téléphones portables qui crachent les décibels dans les ruelles. Et, chose encore plus bizarre, ici, ce phénomène touche tous les âges : des enfants de cinq à six ans (comme dit ma mère : « même les lézards et les roseaux ont des smartphones de nos jours »), tout au plus, en passant par les ados, jusqu’aux jeunes adultes. Il m’est même arrivé de croiser des femmes d’un âge assez avancé qui se baladent avec leur téléphone portable diffusant les dernières louanges en vogue dans les milliers d’églises, traditionnelles ou nouvelles qui pullulent dans le pays. D’ailleurs, vous l’aurez bien remarqué, cet étrange phénomène vise les deux genres. Je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi tant de gens tiennent à faire savoir à tout le monde ce qu’ils aiment écouter en ce moment.

Si seulement cela s’arrêtait à l’usage de portables ou d’accessoires d’ampli… Malheureusement, il y en a qui vont bien au de-là de ces deux types d’appareils, pour imposer à leur voisinage l’écoute de leurs titres favoris de l’heure : prenez mes voisins les plus proches. Tous les matins, bien avant sept heures, l’un d’entre eux allume sa radio, et fait écouter à tout le pâté de maisons, son nouveau CD préféré. Une compilation de chansons religieuses dont je connais déjà enchaînement exact, tant il est impossible de garder les yeux fermés dès que le concert matinal démarre. Chez mes parents, c’est un groupe de jeunes qui, du matin au soir, diffuse toutes sortes de sonorités, des musiques locales au reggae, sans se soucier de l’heure ou de l’incommodité des voisins. Ce qui me fascine le plus, c’est qu’en face de leur point de rassemblement, une petite véranda où l’on vend des boissons alcoolisées, habite un jeune couple avec une petite fille de moins de trois ans. Cela doit être un vrai calvaire pour la mettre au lit le soir avec la musique et, en prime, les hurlements des débats animés de ces jeunes. Et dire qu’ils ont tous plus de dix-huit ans et que certains d’entre eux travaillent et ont des responsabilités !

Il y a aussi les conducteurs ! C’est drôle, mais quand je monte dans certains véhicules, je ne peux m’empêcher de me dire que le propriétaire a surement longtemps rêvé de réaliser ce fameux cliché qui nous vient de l’autre côté de l’Atlantique : rouler vitres baissées, cheveux au vent, avec la musique à fond la caisse ! Il n’est pas interdit de réaliser ses rêves d’enfance, mais doit-on pour autant les imposer aux autres ? Parce que je comprendrais encore qu’on puisse conduire une « discothèque ambulante » lorsqu’on y est tout seul, ou avec des gens qui tolèrent cela, mais le faire avec tout le monde, n’est-ce pas un peu de la dictature ? Je parle bien de dictature, parce que souvent, si vous faites remarquer au conducteur que le son est trop fort, vous êtes sûrs d’entendre : « c’est ma voiture, j’y fais ce que je veux. Si tu n’aimes pas, tu marches ou tu t’en achètes une ! »

Et puis, il y a ceux qui, pour moi, doivent souffrir d’un syndrome d’autodestruction des tympans. Je parle de ceux qui osent utiliser les écouteurs, mais qui mettent la musique si fort qu’à deux mètres d’eux, vous distinguez clairement ce qu’ils écoutent. Il m’est tellement de fois arrivé de devoir presque hurler à mon voisin de table en classe, ou à ma voisine de bureau, que parfois, je me dis qu’ils font semblent de ne pas m’entendre. Mais je vous assure qu’à l’écoute du volume de leurs écouteurs, ils n’y a aucun doute qu’ils ne feignent pas de ne rien entendre ! Et presque souvent, je ne peux m’empêcher de les avertir : « ça rend sourd, tu sais… »

Pour finir, en matière de nuisance sonore, car, pour moi, c’est bien de cela qu’il s’agit, il y a les bars. J’habite un quartier qui, à l’image de la ville qui l’abrite, fait penser à ces clichés des pays caribéens où les gens font la fête du matin au soir, toute la nuit jusqu’au lendemain, sans jamais trop savoir ce qu’on célèbre. Le plus terrible, c’est que dans mon quartier, les bars se concentrent en un endroit, appelé « petit marché », et sont, chose incompréhensible, tous construits le long de la barrière de l’école primaire du coin. Pour y avoir fait toutes mes premières classes, je peux vous assurer que toutes les classes de CP perçoivent, ou plutôt, sont inondés de la cacophonie permanente de ces débits de boissons, qui jouent à qui fera le plus de bruit pour attirer les clients.   


Pour ceux qui ont décidé de se débarrasser le plus rapidement possible de leur capacité auditive, personne ne doit se mettre en travers des choix de chacun, aussi irresponsables soient-ils. Il parait que c’est cela la démocratie. Moi, à chaque fois que je me rends compte que mes écouteurs m’empêchent d’entendre les bruits autour de moi, je pense à mon arrière-grand-mère paternelle, à qui il fallait hurler des phrases qu’en fait, elle n’entendait quasiment pas. J’aimerais que cela arrive le plus tard possible, pour moi. Et pour ceux qui se soucient de leur audition dans les années à venir, il serait temps d’être un peu plus regardant sur la façon dont nous écoutons la musique. Il serait temps aussi, que les uns se soucient un plus de la santé des autres, car si nous le faisons, pas, personne ne le fera, surtout pas dans notre pays où les législations contre les nuisances sont à chercher à la loupe, et, quand elles existent, ne sont carrément pas appliquées. À qui de les faire exécuter : des agents administratifs ? Des agents des forces de l’ordre ? Des agents municipaux ? Ils sont tous visiblement trop occupés pour ce soucier de nos oreilles, et donc de notre santé ! Alors, il ne tient qu’à nous de faire des efforts, pour nous-mêmes, pour nos parents, nos enfants, nos amis, nos voisins et pour le bien-être que mérite chaque citoyen, à commencer par nous !  

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